Chacun de ces hommes est intervenu à sa façon afin d’aider les personnes aveugles ou malvoyantes à acquérir plus d’autonomie et à trouver leur place socialement et professionnellement dans la société. 

Jusqu’au 18ème siècle, l’histoire des aveugles se confond avec celle de tous les autres exclus. Les moins favorisés mendient ou vivent d’expédients.
C’est la publication par Diderot, le 9 juin 1749, de sa Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient, ouvrage évoquant notamment le mathématicien aveugle Saunderson (1682-1739), qui va changer l’image des aveugles dans la société.  

Valentin Haüy (1745-1822)

Il fut l'un des premiers à s'intéresser à l’inclusion sociale et culturelle des aveugles, il est le fondateur de l’actuel Institut National des Jeunes Aveugles (INJA).

Homme de lettres pratiquant outre le latin, le grec et l’hébreu, une dizaine de langues vivantes, il fut professeur du Bureau Académique d’Ecriture et interprète du roi pour les langues espagnole, italienne et portugaise. Choqué par un spectacle donné par de jeunes aveugles à la Foire de Saint Ovide, où ces derniers sont largement moqués, il décide de se mobiliser en faveur des personnes aveugles ou malvoyantes.

C’est ainsi qu’il fonda à Paris en 1786 l'Institution des Enfants Aveugles (première école pour les enfants déficients visuels) qui existe toujours aujourd’hui sous le nom d’INJA. La grande idée de Valentin Haüy était de permettre aux aveugles d’accéder à la lecture. Pour cela, il fit réaliser les lettres de l’alphabet en grand format et s’en servit pour gaufrer le papier. Grâce à cette méthode, il apprit à ses jeunes élèves aveugles à lire, à composer des phrases, à acquérir des rudiments d’orthographe et à faire du calcul.

Ce fut le début pour Valentin Haüy d’une période de plus de trente années totalement dédiée à la cause des aveugles et malvoyants, jusqu’à sa mort en 1822. 

Nicolas Marie Carles Barbier de La Serre 

Précurseur du braille.

Nicolas Marie Charles Barbier de La Serre est né à Valenciennes le 18 mai 1767. Son père, contrôleur des Fermes du roi, le fait admettre en 1782 dans une école militaire, dont il sort officier d’artillerie. Quand la Révolution éclate, il émigre en Amérique où il exerce le métier d’arpenteur.

Revenu en France, il se passionne pour les questions d’écriture rapide et secrète. En 1808, il publie un « Tableau d’expédiographie » et, l’année suivante, « Les principes d’expéditive française pour écrire aussi vite que la parole ». Dans ce traité de 1809, il n’est nullement question d’aveugles, mais de la façon de tracer au canif une écriture simple, lisible dans le noir et déchiffrable à l’aide des doigts, utilisable par conséquent par les officiers en campagne désireux de rédiger ou de lire, dans l’obscurité, des messages codés. Ce système fut appelé « écriture nocturne » et connut différentes variantes.

Ce n’est qu’en 1819 que Charles Barbier de La Serre, lors d’une exposition de ses techniques (et d’une machine qu’il a conçue) au Musée des Produits de l’Industrie, à Paris, s’avise des avantages que les aveugles pourraient tirer de son système. Ceux-ci en effet à cette époque apprennent à lire avec la méthode mise au point en 1784 par Valentin Haüy : des caractères ordinaires simplement agrandis et en relief, et ne peuvent écrire qu’en composant à la façon d’un typographe. Il conçoit alors un nouveau système à l’usage des aveugles qu’il présente en 1821 au directeur de l’Institution Royale des Jeunes Aveugles. Ce système est adopté par l’Institution et soulève dans un premier temps l’enthousiasme des étudiants, en particulier de Louis Braille alors âgé de 12 ans. Cependant le système proposé par Charles Barbier de La Serre, certes plus adapté aux aveugles que le système « Valentin Haüy », comporte néanmoins d’importants défauts : il ne permet qu’une écriture phonétique, ne prend en compte ni la grammaire, ni la ponctuation, ni les chiffres, et demeure relativement complexe, basée sur un comptage de points et non sur l’idée qu’un ensemble de points peut former une image « lisible » au toucher. 

Charles Barbier de La Serre ne souhaitera pas faire évoluer sa méthode, selon les suggestions des élèves de l’Institution et en particulier de Louis Braille. Il s’intéressera plus tard aux sourds muets, puis aux enfants des écoles maternelles. 

Il meurt le 29 avril 1841.

Louis Braille (1809-1852)

Il est l’inventeur du braille, ce système d’écriture tactile à points saillants à l’usage des personnes aveugles ou malvoyantes.

Louis Braille est devenu aveugle accidentellement à l’âge de 3 ans, alors qu’il manipulait une alène (outil qui sert à faire des trous dans le cuir) dans l’atelier de son père. La blessure s’infecta et provoqua peu à peu la cécité chez le jeune garçon. Ses parents voulaient une bonne instruction pour leur enfant désormais handicapé. Ils lui obtinrent une bourse pour son admission au sein de l’école fondée par Valentin Haüy, qui s’appelait à l’époque Institution Royale des Jeunes Aveugles. Louis Braille était un élève très doué qui réussissait dans toutes les disciplines.

C’est durant ses années d’études, en 1821, que le jeune garçon apprendra le système d’écriture en points saillants inventé par Charles Barbier. Entre 1821 et 1829 il travailla sur son propre système à six points (celui de Barbier comprenait douze points au maximum). En 1829, il publia un système combinant des points et des traits en relief pour représenter non seulement les lettres, mais aussi la ponctuation, les notes de musique, et les symboles mathématiques. 

En 1837, il publia le perfectionnement de son système. Les traits étaient abandonnés, l’utilisation logique des 63 combinaisons des 6 points saillants permettant de tout représenter.

Si le système mis au point par Louis Braille a évolué jusqu’à nos jours, il est encore celui utilisé par les personnes aveugles ou malvoyantes notamment pour tout ce qui relève de l’apprentissage, de l’éducation, de la formation. 

Maurice de La Sizeranne (1857-1924)

Il est le fondateur de l’association Valentin-Haüy.

Maurice de La Sizeranne avait 9 ans lorsqu’il perdit la vue dans un accident de jeu. Élève au sein de l’école créée par Valentin Haüy, devenue l’INJA à son époque, il présentait de formidables aptitudes musicales et devint professeur de musique en 1878. Très engagé pour la cause des aveugles, Maurice de La Sizeranne travaillait à la conception d’une nouvelle méthode abréviative de l’écriture braille qui aboutit en 1880 à L’Abrégé orthographique français.

Maurice de La Sizeranne constata que, malgré les progrès réalisés dans l’éducation des jeunes aveugles, ceux-ci se trouvaient à la sortie de l’école, livrés à eux-mêmes et privés de toute information qui leur permettrait de s’insérer dans le monde du travail. Dès lors, il prit un certain nombre d'initiatives pour remédier à cela. Tout d’abord, il créa trois périodiques : Le Louis Braille, Le Valentin Haüy et La Revue Braille en 1883 et 1884. Il fonda également en 1886 une bibliothèque braille complétée par une bibliothèque braille musicale peu après.

Il s’entourait de personnalités susceptibles de s’intéresser au sort des aveugles (professeurs de l’INJA, inventeurs, directeurs d’écoles…) afin d’accélérer ses initiatives en faveur des personnes aveugles ou malvoyantes. C’est au cours de l’une de leurs réunions que furent jetées les bases de ce qui allait devenir l’association Valentin Haüy, fondée en 1889 et reconnue d’utilité publique en 1891.

Maurice de La Sizeranne resta 35 ans au poste de Secrétaire général de cette association, jusqu’à sa mort en 1924. Il n’aura de cesse de mener des actions en faveur de l’insertion sociale et culturelle des personnes aveugles ou malvoyantes.

Les revues historiques de l'association : Le Valentin Haüy et Le Louis Braille sont consultables sur les liens suivants.